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Reporté au 31 octobre, quelle est la situation politique britannique actuelle avec ce Brexit retardé ?
La situation au Royaume-Uni reste confuse, l’opinion publique britannique étant divisée sur la question de savoir si quitter l’UE est la bonne chose à faire pour la Grande-Bretagne. La démission du Premier ministre Theresa May le 24 mai signifie qu’il faudra probablement attendre la fin du mois de juillet avant qu’un nouveau Premier ministre ne soit confirmé et que le Royaume-Uni puisse élaborer une politique claire sur ce qu’il faut faire à propos du Brexit.
Sur le plan juridique, la Grande-Bretagne devrait quitter automatiquement l’UE le 31 octobre, avec ou sans accord, à moins qu’une nouvelle prorogation ne soit convenue avec l’UE (une possibilité distincte), ou que la décision Brexit ne soit complètement révoquée (très peu probable).
La question politique est donc de savoir si le Royaume-Uni doit poursuivre ses efforts pour tenter de trouver un accord de retrait de compromis, ou simplement laisser l’UE sans accord et mener son commerce avec l’Union européenne sur la base des calendriers de l’OMC.
L’ancien ministre des Affaires étrangères Boris Johnson, qui s’est engagé en faveur d’un « Brexit dur » (c’est-à-dire quitter l’UE sans accord si nécessaire), est actuellement le favori pour remplacer Theresa May. Mais c’est précisément pour cette raison que les membres du parti conservateur au pouvoir s’opposeront fermement à sa candidature, car ils croient qu’un Brexit » sans accord » serait très dommageable pour l’économie britannique. La prochaine élection à la direction du Parti conservateur sera donc difficile et imprévisible.
Quel pourrait être l’impact du Brexit sur les politiques commerciales du Royaume-Uni avec les pays africains ?
Le Royaume-Uni tient à se positionner comme un « ami » de l’Afrique, étant donné ses liens étroits avec de nombreux pays africains, ses intérêts en matière d’investissement dans de nombreux secteurs et son engagement fondamental en faveur du commerce (relativement) ouvert. Le prétendu » protectionnisme » de l’UE à l’égard des pays en développement a souvent été cité par les militants pro-Brexit comme une raison pour laquelle le Royaume-Uni devrait quitter le bloc, bien qu’en fait l’UE dispose d’un système bien développé (bien qu’incomplet) de préférences tarifaires pour les importations en provenance des pays africains et autres pays en développement, que le Royaume-Uni devra reproduire après son départ du bloc.
Le Royaume-Uni s’est engagé à maintenir l’accès en franchise de droits et de quotas à son marché pour les 33 pays les moins avancés (PMA) d’Afrique une fois qu’il aura quitté le bloc. Pour les pays qui n’ont pas le statut de PMA, cependant, la situation est plus compliquée.
La mosaïque des accords de partenariat économique (APE) régionaux, en vertu desquels les pays en développement bénéficient d’un accès préférentiel tant au marché de l’UE qu’à leurs marchés respectifs, doit être « reconduite » pour être appliquée au Royaume-Uni après Brexit.
Jusqu’à présent, la Grande-Bretagne n’a reconduit qu’un seul APE africain – l’accord de l’Afrique orientale et australe (ESA) qui englobe Maurice, les Seychelles, le Zimbabwe et Madagascar.
Les négociations se poursuivent toujours avec le groupe SADC (Afrique du Sud, Botswana, Lesotho, Mozambique, Namibie, Namibie et Eswatini), tandis que les accords commerciaux de l’UE avec le Cameroun, le Ghana et la Côte d’Ivoire ne sont pas encore approuvés pour application par le Royaume-Uni.
Cela signifie que si le Royaume-Uni devait quitter l’UE sans aucun accord d’union douanière avec l’UE, les échanges commerciaux avec tous ces pays devraient se faire dans les mêmes conditions que tout autre pays, c’est-à-dire de manière non-préférentielle.
Les producteurs africains de bananes, en particulier ghanéens, s’inquiètent des résultats du Brexit : quelles sont les options actuelles favorisées par Londres pour ce secteur très compétitif au niveau mondial ?
Le Royaume-Uni a déclaré qu’en cas d’un « no-deal Brexit », il appliquera un droit de 114 € par tonne sur les importations de bananes non préférentielles – le même que celui de la nation la plus favorisée (NPF) de l’UE. Les pays qui sont couverts par des accords commerciaux préférentiels conserveront donc leurs préférences tarifaires actuelles à l’égard des fournisseurs NPF.
Toutefois, le Royaume-Uni a déjà reconduit les termes de l’accord commercial de l’UE avec les pays du Pacte andin (Équateur, Colombie et Pérou), y compris le maintien d’un tarif préférentiel de 75 euros par tonne sur les bananes de cette région. Ces trois pays ont représenté 41 % des importations de bananes britanniques (en valeur) en 2018.
Un autre APE reconduit est celui avec les pays du CARIFORUM, qui garantit le maintien de l’accès en franchise de droits au marché britannique pour les bananes en provenance de Sainte-Lucie, du Belize et de la République dominicaine.
Les négociations visant à reconduire l’accord commercial entre l’UE et l’Amérique centrale, qui bénéficie également d’une préférence tarifaire de 75 euros par tonne de bananes, n’ont toutefois pas encore abouti. Les pays d’Amérique centrale ont contribué à hauteur de 23 % des importations de bananes du Royaume-Uni en 2018.
Et, dans l’état actuel des choses, il n’existe pas non plus de disposition prévoyant un accès préférentiel au marché britannique de la banane pour les pays africains qui ne sont pas des PMA.
Le Cameroun, le Ghana et la Côte d’Ivoire représentent à eux trois près de 13 % des importations de bananes du Royaume-Uni, mais ils seraient confrontés à l’imposition d’un droit de douane de 114 €/tonne sur les ventes à la Grande-Bretagne, sauf accord de reconduction entre-temps. Il est presque certain qu’ils seraient ainsi évincés du marché britannique au profit d’approvisionnements en provenance de l’Équateur, de la Colombie ou des Caraïbes.
Le Royaume-Uni n’a aucune volonté stratégique de modifier l’équilibre des préférences pour les pays africains qui commercialisent des bananes ou tout autre produit, mais la complexité politique et technique du Brexit est telle qu’il pourrait finir par le faire – ne serait-ce que temporairement – par accident.