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9 avril 20203 questions à…. Dieu Donné OKALAS OSSAMI, CEO de E-Tumba.
Quel constat vous a mené à développer votre projet? Quel objectif vous-êtes-vous fixé à travers E-Tumba ?
Aujourd’hui pour être accompagné dans son activité de production quotidienne, l’agriculteur africain dispose d’une fiche technique (i.e. la fiche « coton », la fiche « maïs ») combinant ses propres références et celles fournies par les structures d’encadrement avec laquelle il est en relation (agro-industriels, sociétés agricoles, coopératives, etc.). Ces fiches techniques correspondent à des situations de production idéales, sans contraintes de main d’œuvre, de climat, d’équipements, de finances et d’accès aux intrants.
Elles constituent finalement plutôt des guides ou des recommandations standards peu adaptés aux situations de chaque agriculteur et aux caractéristiques d’années données et de chacune de ses parcelles. Par ailleurs, le conseil agricole repose le plus souvent sur ces fiches techniques. Il s’adresse à des milliers d’agriculteurs dans un bassin de production donné. Les conseillers agricoles sont en nombre limité et doivent s’adresser, chacun, à plusieurs centaines de producteurs.
Ce format de conseil standardisé par le biais de fiche technique rencontre des difficultés de pertinence, notamment sur les questions de risques climatiques. De même, tous les outils basés sur ces fiches observent de facto des difficultés en termes d’adoption pour trois principales raisons :
– l’information, trop généraliste, est basée sur des fiches techniques et des « best practices » pas toujours adaptés à la situation individuelle de chaque agriculteur
– le changement d’échelle : les conseils agricoles fournis sont élaborés par des techniciens agricoles en nombre trop limité pour suivre des millions de petits exploitants
– le coût
Il nous est donc apparu que ce format de conseil, très standardisé n’était pas assez précis et adapté aux enjeux de chaque exploitation, contribuant donc à une stagnation des rendements et de la productivité, en conséquence de quoi, l’activité agricole exerce peu d’effet d’entraînement sur la croissance économique.
C’est forts de ce constat et pour apporter une réponse concrète à ces difficultés qu’E-Tumba a été créé. Avec des conseils individualisés, spécifiques aux particularités de chaque parcelle cultivée, et générés sur la base de modèles, la solution développée par E-Tumba lève les difficultés de pertinence de l’information et de changement d’échelle. Enfin, comme la mise en œuvre des modèles est centralisée, les coûts sont réduits.
Avec E-Tumba, je me suis fixé l’objectif de contribuer à la transition numérique du conseil agricole en Afrique et la professionnalisation des petits agriculteurs en facilitant leur intégration dans les chaines de valeur agroalimentaires.
Quels sont, selon vous, les plus importants leviers d’amélioration des pratiques agricoles africaines aujourd’hui et comment E-Tumba s’inscrit dans cette démarche ?
Pour moi, l’amélioration des pratiques agricoles africaines passe par 2 principaux leviers. Il faut développer la formation technique en associant les entreprises dans la définition des cursus et des compétences. Il est aussi clair qu’une meilleure structuration des filières, « de la fourche à la fourchette », est nécessaire. Cela se construit en contractualisant en amont les relations techniques, commerciales et financières entre les petits agriculteurs et les agro-industriels et en développant des « origines » et « appellations contrôlées ou protégées » afin de structurer et faciliter l’accès aux marchés en aval.
E-tumba s’inscrit dans cette démarche en suivant une approche de co-construction de l’expertise ; les outils développés par E-tumba sont le fruit d’un travail conjoint entre les agriculteurs, les structures d’accompagnement locales et l’expertise des agro-industriels. Ils sont basés sur les besoins et non sur l’offre. Par conséquent, ils peuvent s’adapter aux besoins de chaque maillon de la chaîne de valeur et être améliorés régulièrement.
Quels sont les retours des bénéficiaires ? Quels freins rencontrez-vous concernant le déploiement de votre solution et que mettez-vous en place à ce sujet ?
Les freins dans le déploiement de la solution e-Tumba sont principalement liés à :
· la trop forte diversité des agriculteurs qui oblige à tenir compte du niveau de technicité, du niveau d’éducation, des moyens de production de chaque agriculteur, etc.
· l’éclatement géographique des agriculteurs sur des territoires souvent très grands, rendant ainsi difficile les opérations de recensement,
· la non existence du foncier dans certains pays qui oblige la validation saisonnière des surfaces cultivées pour mieux déterminer les quantités d’intrants nécessaires à distribuer par parcelle.
· La connexion internet limitée dans certains territoires.
Pour délivrer un conseil individualisé, tous ces facteurs sont pris en compte par la solution E-tumba.
Jusqu’à présent, les retours des principaux bénéficiaires sont très positifs car la solution permet globalement d’améliorer la performance sur plusieurs plans.
En effet, notre système permet aux producteurs :
- d’optimiser les rendements tout en répondant aux enjeux environnementaux
- de réaliser des économies directes d’intrants grâce à un diagnostic précis des besoins des plantes, accrues par la hausse du prix du marché
- d’organiser les interventions terrain, grâce aux alertes et aux recommandations opportunes
- de bénéficier des conseils d’un Conseil agronomique expert pour optimiser la qualité et le respect de l’environnement
La prise en main de la solution est facilitée avant tout déploiement par une formation des acteurs de terrain locaux et un accompagnement de proximité tout au long de la saison. Nous commençons toujours par un projet pilote sur un échantillon limité, mais significatif avant tout déploiement à une échelle plus large. Ceci permet de mieux calibrer la solution au contexte de production particulier du partenaire cible.